Lors de la présentation de ses résultats du 1er trimestre 2017 le 9 mai 2017, EDF a mis en évidence l’impact négatif sur le chiffre d’affaires France des ventes ARENH (Accès Régulé à l’Electricité Nucléaire Historique) et marché : -49 Mio € attribués « principalement production et sourcing de la souscription ARENH » ; et Xavier Girre (CFO EDF) de déclarer : « Nous considérons qu’il est nécessaire aussi, et équitable, de réformer le mécanisme ARENH afin de l’empêcher d’être aussi biaisé qu’il l’est aujourd’hui »
Instauré par la loi NOME du 7 décembre 2010 et mis en place depuis le 1er juillet 2011, le mécanisme de l’ARENH est pourtant déjà ancien. Il semblait même être promis à l’obsolescence avec les marchés de gros qui, depuis décembre 2014, se sont durablement installés à des niveaux inférieurs au prix fixé pour l’ARENH (avec la notable exception de la fin de l’année 2016), à tel point que l’ARENH n’avait fait l’objet d’aucune demande pour l’année de livraison 2016.
Pourquoi relancer ce débat alors qu’un nouveau décret du 21 mars 2017 encadrant davantage le mécanisme vient d’être promulgué ? Analysons donc la situation actuelle, replaçons ce troisième paramètre du prix de l’énergie électrique dans son contexte et définissons ses enjeux.
Tout d’abord revenons sur le principe :
L’ARENH a été instauré, pour une période transitoire allant du 1er juillet 2011 au 31 décembre 2025, « afin d’assurer la liberté de choix du fournisseur d’électricité tout en faisant bénéficier l’attractivité du territoire et l’ensemble des consommateurs de la compétitivité du parc électro-nucléaire français ». Le volume total mis à disposition est limité à 100TWh/an.
Le produit ARENH est par essence annuel mais, afin de permettre aux fournisseurs d’ajuster leurs besoins à l’évolution de leur portefeuille, la souscription se fait à deux guichets semestriels (novembre et mai). Dans le but de renforcer ce caractère annuel et de limiter des possibilités d’arbitrages, le dispositif prévoit une clause dite « de monotonie » qui contraint les fournisseurs à faire évoluer leur demande dans le même sens à deux guichets semestriels consécutifs. (Clause renforcée par de décret du 21 mars 2017)
Le résultat :
La figure ci-dessous (extrait du rapport de l’Autorité de la Concurrence du 8/2/2017) illustre bien le succès et l’efficacité du dispositif mais aussi sa corrélation avec les prix des marchés de gros :
Le fonctionnement du mécanisme est effectivement perturbé depuis que, contre l’attente du législateur de 2010, le prix de l’ARENH se trouve au-dessus des prix de marché. La perturbation est d’autant plus forte quand, en l’espace de quelques mois, les prix de marché se trouvent alternativement fortement en dessous, fortement au-dessus et à nouveau fortement en dessous du niveau de l’ARENH !
Le comportement des acteurs lors du guichet du 16 mai 2017 a montré toute l’efficacité du nouveau décret : les volumes commandés pour le premier semestre 2017 ont bien été reconduits pour le second semestre afin de respecter la logique annuelle du produit, alors qu’avec les prix de marchés BL Q3 : 32,15€/MWh, BL Q4 : 42,85€/MWh et la capacité à 10.000€/MW, l’ARENH était « out of the money » de ~4€/MWh !
Nous ne sommes donc plus très sûrs à quel « biais » il a été fait allusion (asymétrie commerciale entre Edf et les fournisseurs alternatifs : délais de paiement, gestion du cap, ajustement au portefeuille, pénalités… ?). Par contre il nous semble plus important que le débat se recentre maintenant sur la question de la cohérence entre les 3 paramètres définis par la loi NOME, à savoir : les prix de marché, le prix de la capacité et l’ARENH.
« Avec une production nucléaire qui représente plus de 70% du total, deux choses sont donc primordiales : (i) que l’ARENH retrouve un niveau reflétant le coût complet de ce nucléaire français (voir notre article(1) à ce sujet), et (ii) que le marché de capacité gagne en maturité pour assurer la compétitivité de l’ARENH (garanties de capacités comprises) vis-à-vis du marché de gros,
(1) Voir l’article Une chance à saisir.