Perspectives du gaz : prix, réserves et sécurité d’approvisionnement

Depuis le début de l’année 2025, les marchés gaziers européens subissent des pressions importantes ; l’offre et la demande connaissent un équilibre délicat. Les prix ont augmenté par rapport à l’année précédente en raison de tensions géopolitiques au Moyen-Orient et en Russie, des ruptures dans l’approvisionnement, des faibles niveaux des réserves de gaz, d’un équilibre restreint entre l’offre et la demande de GNL (Gas Naturel Liquéfié) et des températures changeantes. Néanmoins, à moyen terme, les prix devraient se stabiliser grâce à l’essor de nouveaux projets de GNL et à la diversification des sources d’approvisionnement en Europe.

La demande de gaz diminue pendant les périodes de production maximale d’électricité provenant de sources renouvelables et toute avancée dans la résolution du conflit entre la Russie et l’Ukraine pourrait contribuer à une réduction des prix. De plus, des pays comme l’Australie et le Qatar devraient augmenter leurs exportations de GNL, tandis que les États-Unis s’imposent comme acteur principal sur le marché du gaz en raison de leur importante capacité d’exportation de GNL et des prix faibles du gaz sur le marché intérieur. Cette évolution devrait atténuer les restrictions mises en place par l’Europe concernant l’importation de gaz russe par gazoduc.

Analysons de plus près les perspectives gazières :

  • Situation actuelle, à la fin de l’hiver
  • Tendances qui auront une influence les mois à venir.
  • Etat des lieux sur les tensions actuelles ayant un impact sur l’offre et les prix.

Des réserves de gaz faibles à la fin de l'hiver

Selon l’analyse pré-hivernale de HES (Perspectives hivernales et sécurité de l’approvisionnement énergétique, octobre 2024), les niveaux de stockage de gaz en Europe avaient un niveau confortable à 94,37 % au 30 septembre. Il convient de rappeler que depuis le début de l’invasion russe, l’Union européenne a imposé un niveau minimum de réserve de gaz à 90 % au 1er novembre (versus 80%). Cette mesure doit être respectée chaque année par tous les pays membres afin d’être prêt pour les mois de forte demande de l’hiver gazier.

Fin février 2025, les stocks de gaz naturel sont à moins de 40 % pour la plupart des pays européens. Ces niveaux ont considérablement baissé par rapport à la même date en 2024 (voir tableau 1)

Gas storages Levels in Europe

Tableau 1 : Niveaux de stockage de gaz, 04/03/2025 – Source : GIE (Gas Infrastructure Europe)

Les niveaux sont faibles par rapport aux années précédentes dans un contexte de températures froides, de reprise industrielle (inférieure au niveau d’avant la crise) et de forte demande. La demande européenne de gaz a connu une forte augmentation de 7 % en glissement annuel au quatrième trimestre 2024, en raison des facteurs suivants :

  • Le phénomène de « Dunkelflaute » (terme allemand désignant une période de faible ensoleillement combinée à peu de vent qui fait chuter la production d’électricité renouvelable) devient plus fréquent en hiver dans toute l’Europe, ce qui favorise la production d’électricité à partir de gaz. Il faut contraster ce phénomène avec la tendance à long terme qui a une perspective baissière de la demande de gaz dans ce secteur en raison de la croissance des énergies renouvelables et de la disponibilité du nucléaire. Des pics de consommation de gaz à court terme se produiront lors des périodes de temps plus froid.
  • La reprise fragile de la demande de gaz industriel s’est poursuivie, mais elle reste bien en deçà des niveaux d’avant la crise, entravée par une faible production manufacturière et des incertitudes économiques.
  • Les températures plus froides au quatrième trimestre ont entraîné une légère augmentation de la demande de gaz pour le chauffage, mais les habitudes des consommateurs en matière d’économie d’énergie persistent. En France, par exemple, l’hiver 2024/2025 a été le plus froid depuis 7 ans.

Au cours des six derniers mois, les prix spot du gaz TTF ont augmenté de 18,49 %. Les contrats day-ahead sur le TTF néerlandais ont atteint 55,90 €/MWh le 10 février (voir graphique ci-dessous).

Gas Day-ahead contracts TTF, 01/2022 – 02/2025

Contrats day-ahead gaz TTF, 01/2022 – 02/2025 – Source : HES

Tensions sur l'approvisionnement en gaz

EU 27 plus UK gas supply by source

Approvisionnement en gaz de l’UE-27 et du Royaume-Uni par source (BCM) Source : J. Sharples (OIES). Données d’Eurostat, ENTSOG, National Gas Transmission (Royaume-Uni), Gas infrastructure Europe.

Les importations par gazoduc ont été la principale source de gaz en Europe en 2024. La Norvège est restée le premier fournisseur de gaz par gazoduc de l’UE, avec 42 %, suivie par la Russie (18 %) et l’Algérie (16 %).

La part du volume total de gaz provenant de Russie a diminué de 40 % à 9 % entre 2021 et 2023 mais les importations de gaz naturel russe ont atteint 18 % en 2024. L’UE reste un gros consommateur de gaz naturel et de GNL russe ; uniquement sur octobre 2024, l’UE a acheté 49 % des exportations russes de GNL et 50 % de l’ensemble de ses exportations de gaz par gazoduc.

Au début de l’année 2025, la fin de l’accord de transit de gaz Gazprom-Naftogaz a accru l’incertitude sur le marché du gaz en Europe. L’approvisionnement en gaz de l’Europe s’en est trouvé réduit, laissant la ligne TurkStream comme seule voie d’importation du gaz russe en Europe. De plus, la guerre entre la Russie et l’Ukraine se poursuit. Les dernières nouvelles font état d’une reprise des contacts entre les responsables russes et américains, qui ont eu lieu en février 2025, en vue d’un accord potentiel pour mettre fin à la guerre, mais en excluant la partie ukrainienne. D’autres pourparlers ont eu lieu au début de ce mois de mars pour explorer les opportunités économiques et d’investissement entre l’Ukraine et les États-Unis qui pourraient mettre fin à la guerre et trouver la « paix » par un accord avec la Russie.

Nous pouvons rappeler que depuis le début de la guerre, l’Europe a ajouté 78,6 milliards de m3 de nouvelles capacités de regazéification du GNL (dont 70,9 milliards de m3 ajouté par l’UE) dans un potentiel scénario de croissance des importations de GNL. Toutefois, le taux d’utilisation moyen des terminaux de l’UE n’a pas eu le développement escompté et est passé de 58 % en 2023 à 42 % en 2024. Certains projets sont même bloqués ou annulés. Les principaux importateurs de GNL de l’UE sont les États-Unis (45 %), suivis par la Russie (19 %), le Qatar (12 %) et l’Algérie (8 %).

Les États-Unis exhortent l’Union européenne à acheter davantage de GNL américain et ont menacé d’imposer des droits de douane si les demandes n’étaient pas satisfaites. En réponse, un accord sur le GNL est en cours de négociation, bien que l’UE continue à diversifier ses sources d’approvisionnement.

Au niveau mondial, en 2024, la région Asie-Pacifique (principal acteur dans la demande de GNL) a représenté près de 45 % de la croissance supplémentaire de la consommation de gaz, grâce à l’expansion économique. Cette concurrence pour la demande de GNL a eu un impact sur les prix, qui sont internationaux et dépendent de l’appétit pour le gaz dans d’autres parties du monde.

L’Europe devrait bénéficier des transformations des marchés mondiaux. L’interdiction attendue par l’Union européenne d’importer du gaz naturel liquéfié russe pourrait entraîner une baisse des prix du gaz étant donné que les approvisionnements seraient redirigés vers les marchés asiatiques, réduisant ainsi la concurrence du GNL américain. Alors que la dynamique de l’offre et de la demande de GNL devrait rester tendue jusqu’en 2025, un excédent devrait se faire ressentir à la fin de l’année 2025 ou en début 2026.

La perspective d’une plus grande stabilité des prix du gaz est liée à l’augmentation du GNL en provenance des États-Unis et du Qatar, qui devrait augmenter de 60 % d’ici 2030. En outre, Bruxelles prévoit de poursuivre une stratégie différente en s’appuyant sur des fournisseurs fiables pour trouver des importations à des prix compétitifs sur des projets d’exportation de GNL actuels et futurs. L’UE vise également à aider les consommateurs finaux pour obtenir des contrats à long terme afin de rendre l’énergie plus abordable.

Parallèlement, les tensions géopolitiques au Moyen-Orient continuent d’influer sur l’évolution de la situation énergétique mondiale en raison du rôle crucial de la région dans la production de pétrole et de gaz, ce qui compromet les exportations de GNL du Qatar vers l’Europe. On estime que les flux à travers le Golfe Persique représentent environ 20 % des exportations mondiales de gaz.

Les implications à long terme des conflits au Moyen-Orient sont encore incertaines et risquent d’être influencées par la dynamique actuelle de ces conflits ainsi que par le contexte géopolitique plus large de la région. Alors que les pays s’efforcent de naviguer dans cet environnement complexe, la relation entre les développements politiques et les prix mondiaux du pétrole restera un facteur crucial dans la formation des prix du gaz.

La principale conséquence de la situation précédement commentée se traduit par une exposition accrue au risque de la pression mondiale sur les prix du GNL en Europe, car les importations de GNL sont et seront nécessaires pour répondre à la demande à court et moyen terme.

La situation est-elle sous contrôle pour les mois à venir ?

Leviers qui auront un impact à court terme sur la sécurité de l’approvisionnement en gaz  :

Incertitude sur la demande de gaz

L’hiver touche à sa fin, mais une vague de froid, combinée avec une baisse de la production renouvelable et une forte demande pourrait encore réduire les réserves de gaz, ce qui exercerait une pression sur la saison de remplissage estivale.

Difficultés pour le remplissage des stocks de gaz pour l’hiver prochain

À titre exceptionnel, les prix futurs de l’été sont plus élevés que ceux de l’hiver. Le problème est de savoir quelle quantité de gaz naturel sera nécessaire pour remplir les stocks de gaz en Europe. La saison estivale de remplissage des réserves de gaz exerce une pression sur les prix. Un nouveau mandat sera publié par la Commission européenne pour étendre sa réglementation sur le stockage du gaz d’ici la fin du mois de mars, proposant différents niveaux de stockage pour 2025.

Prévisions de prix

Les fluctuations de prix complexifient la situation. Ces dernières sont dues à l’instabilité de la chaîne d’approvisionnement, aux événements géopolitiques et aux transactions spéculatives. Pour les consommateurs et les industries, il est donc difficile d’estimer les coûts liés à l’énergie.

Origine des exportations de gaz

Diversification des fournisseurs de GNL en Europe, mais impact de la concurrence sur la demande de GNL en raison de l’expansion économique dans la région Asie-Pacifique.

Tensions géopolitiques

Les tensions géopolitiques continuent de façonner le paysage gazier mondial, avec les conflits en cours, les sanctions et les changements de politique stratégique pouvant entraîner des restrictions ou des réorientations de l'approvisionnement.

En conclusion, des tensions et des incertitudes persistent à moyen terme sur les perspectives des marchés gaziers européens. Des perturbations mineures imprévues du côté de l’approvisionnement, comme le changement de routes des bâteaux de GNL vers l’Asie, ou du côté de la demande, comme une fin d’hiver exceptionnellement froide, ou une augmentation de la consommation de gaz pour la production d’électricité en raison de la réduction des énergies renouvelables, pourraient déclencher une hausse importante des prix. Ce premier semestre risque de connaître une nouvelle période de forte volatilité des prix du gaz, comme nous l’avons déjà vécu en ce début d’année.

Bien que certains pays assouplissent les règles de stockage de gaz pour alléger la pression, une réserve tampon sera toujours nécessaire pour l’hiver prochain. Par ailleurs, le rétablissement de l’approvisionnement en gaz russe reste incertain. Bien que les pressions exercées par le président des Etats-Unis en faveur d’un cessez-le feu de la guerre en Ukraine aient eu un impact sur les prix, une paix durable semble peu probable dans un avenir proche.

Les niveaux des réserves de gaz européennes sont faibles et la région devra durant l’été les remplir à nouveau pour se préparer pour la prochaine saison hivernale. Même avec des températures plus chaudes et une augmentation des importations de GNL, les conditions d’approvisionnement devraient rester tendues jusqu’à ce que de nouveaux projets de GNL soient mis en service à l’horizon 2026. D’ici là, l’Europe doit améliorer son efficacité énergétique, diversifier ses approvisionnements et renforcer sa sécurité énergétique. Le gaz reste crucial pour la sécurité énergétique en Europe car il permet une production d’électricité flexible en complément des énergies renouvelables.

Céline Haya Sauvage & Cheyenne Rueda Lagasse 

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Expérience professionnelle & Education

Diego est diplômé en Sciences Politiques de l’université King’s College (Londres – 2021). Il a débuté sa carrière professionnelle dans une entreprise familiale à Madrid en tant que responsable des opérations. Par la suite, Diego a suivi un double programme en niveau master en Gestion et en Informatique à l’IE Universidad (Madrid – 2022), au cours duquel il a réalisé son stage en informatique dans une startup. En mai 2023, Diego a rejoint l’équipe de HES en tant que stagiaire spécialisé dans la programmation de modèles. Pour son premier projet, il a développé un outil logiciel afin de modéliser l’indisponibilité du parc nucléaire français. Par la suite, Diego a été impliqué dans le développement de nouveaux outils logiciels pour modéliser les courbes de prix, la performance des actifs de production et d’autres sujets liés au secteur énergétique. Depuis janvier 2024, Diego est en contrat indéfini chez HES. 

Diego Marroquín

Consultant Junior

Haya Energy-6

Expérience professionnelle

Céline a rejoint l’équipe de Haya Energy Solutions en novembre 2021 en tant que responsable du marketing et de l’administration. Lors de sa première expérience professionnelle, dans le secteur du tourisme, elle exerça en tant que managerdes réseaux sociaux. Chez HES, ses missions participent au développement de notoriété et de visibilité de l’entreprise au niveau européen au travers d’actions commerciales (relations avec le client), marketing de contenu et développement de la stratégie de marque. Céline est également impliquée dans la gestion de la communication de l’entreprise : création et optimisation du site internet (WordPress & Elementor), LinkedIn, envoie de la newsletter mensuelle et organisation de conférences. De plus, Céline est impliquée dans les projets énergétiques avec les clients et agit en tant que coordinatrice de projets ou cheffe de projet. Enfin, elle est en charge de l’administration de l’entreprise (comptabilité, gestion des frais, facturation). 

Formation

Céline est diplômée en LLCER langues espagnole et anglaise à La Sorbonne (France – 2018) et est titulaire d’un Master en gestion de projets et tourisme culturel (Clermont-Ferrand/ Buenos Aires – 2021).     

Céline Haya Sauvage

Responsable Marketing

Céline Sauvage

Conseil en investissement

« La décarbonisation des secteurs de l’énergie et des transports est sans doute aujourd’hui le principal moteur économique de l’industrie. »

Expérience professionnelle

Il a débuté sa carrière dans le génie civil en tant que chef de projet en France, en Martinique et en Australie. Par la suite, il devient directeur général d’une filiale au Venezuela. En 1992, il crée une filale pour Dalkia en Allemagne (chauffage urbain, cogénération et partenariats) et représente Véolia en Thaïlande. En 2000, il a ouvert le bureau commercial d’Endesa en France pour profiter de la libéralisation du marché de détail. A partir de 2006, en tant que responsable du développement chez Endesa France, il a dirigé le plan d’Endesa pour la production à cycle combiné gaz en France et a simultanément développé le portefeuille éolien et photovoltaïque de la Snet. Philippe Boulanger a ensuite travaillé pendant 3 ans au siège d’E.ON pour coordonner les activités de l’entreprise en France. Il a été fortement impliqué dans le projet français de renouvellement de la concession hydroélectrique. En tant que Senior Vice President – Project Director chez Solvay Energy Services d’avril 2012 à février 2014, il était en charge des projets de déploiement H2/Power to gas et d’accès direct au marché européen. Philippe est un expert pour HES depuis 2014.

Formation

Philippe Boulanger est ingénieur diplômé de l’Ecole Polytechnique et de l’Ecole Nationale des Ponts & Chaussées (France) et possède une expérience combinée de plus de 25 ans en énergie et infrastructures. En plus de l’anglais, M. Boulanger parle couramment le français, l’allemand et l’espagnol.

Philippe Boulanger

Electricity Expert

HES-Philippe-Boulanger

« Le monde est en train de changer. De nouveaux investisseurs accordent une attention particulière au secteur de l’énergie alors que les acteurs historiques adaptent leur position sur le marché. »

Expérience professionnelle

Antonio a commencé sa carrière dans le secteur de l’électricité en 1991 en tant que membre de l’équipe du directeur général de Sevillana de Electricidad (Espagne). En 1997, il a été nommé responsable de la réglementation commerciale chez Endesa Distribución. En 2000, il rejoint le département des fusions et acquisitions d’Endesa Europe. En 2003, il est nommé directeur général d’Endesa Power Trading Ltd (UK). Un an plus tard, il devient responsable de la gestion de l’énergie à la SNET (France). En 2008, il est nommé directeur général de la SNET (France). En 2009, il devient directeur du développement de l’entreprise chez E.ON France. En 2011, il fonde Haya Energy Solutions (HES), un cabinet de conseil axé sur l’optimisation de la gestion énergétique des consommateurs, des producteurs et des fournisseurs de gaz et d’électricité. De 2015 à 2018, Antonio a combiné son activité de conseil chez HES avec la direction générale de 2 sites de production en France (2 CCGT x 410MW), détenus par KKR. Fin 2018, il a rejoint Asterion Industrial Partners, un fonds d’investissement dans les infrastructures, en tant que partenaire opérationnel. Antonio consacre, actuellement, l’essentiel de son temps au portefeuille d’Asterion, tout en conseillant, par l’intermédiaire de HES, des entreprises du secteur de l’énergie en France, en Italie, en Allemagne, au Royaume-Uni et en Espagne. 

Formation

Antonio est diplômé de l’Ecole Supérieure d’Ingénieurs de Séville (Espagne) et est titulaire d’un MBA de Deusto (Espagne). 

Antonio Haya

CEO

Antonio Haya